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Pas si écolos les trottinettes électriques en libre-service ? Rédigé par Philippe Schwoerer le 20 Juin 2019 à 00:00 0 commentaires

Une étude intitulée « La promesse et les pièges du partage de trottinettes électriques » et publiée par Boston Consulting Group, en mai dernier, pointe les difficultés et points noirs qui s’accumulent autour de ces engins branchés proposés en location free-floating dans les grandes villes. Avec une durée de vie qui ne dépasserait pas 3 mois, le modèle économique est remis en question, mais aussi sa présence comme solution de déplacement vertueuse pour la planète du fait des batteries lithium mises à mal et trop peu recyclées. Sur ce dernier point, les cartes sont dans les mains des opérateurs, des fabricants, mais aussi des pouvoirs publics.

12 opérateurs mondiaux

Selon Boston Consulting Group, ce sont 12 opérateurs principaux qui se partagent le gâteau mondial des services de trottinettes électriques partagées. Le biscuit pèse 1,5 milliard de dollars (1,33 milliard d’euros). Le cabinet d’études estime que son poids pourrait se situer entre 40 et 50 milliards de dollars (35 à 55 milliards d’euros) à échéance 2025, dont 12-15 (10,6-13,3) pour l’Europe. Sauf que divers obstacles apparaissent avec le temps. A celui de la difficulté à trouver la rentabilité face à une concurrence agressive, s’ajoutent « les problèmes de circulation, de sécurité publique, de stationnement, d’autorisations et de responsabilité ». Si en plus l’apport pour l’environnement est minime, voire négatif… D’où cette question autour de la pertinence des trottinettes électriques dans la micromobilité urbaine.

Les raisons d’un engouement majeur

Si les ces engins branchés en location free-floating se développent autant et si rapidement, c’est parce qu’ils répondent aussi bien à des besoins pratiques qu’à l’idée de se déplacer facilement et de façon peu onéreuse, avec une résonnance qui remonte jusqu’à l’insouciance de l’enfance. Une nouvelle bulle d’isolement, de plaisir, et de transition entre le travail et la vie personnelle, comme l’a été et l’est encore souvent la voiture particulière. Les plus de ces engins légers, ce sont la facilité de les abandonner un peu partout dans la rue sans avoir à chercher une place de stationnement, la quasi absence de transpiration en les utilisant, et la possibilité de les coupler facilement avec d’autres modes de déplacements, dont les transports en commun, par exemple.

0,5 à 4 km

Dans son étude, Boston Consulting Group estime que les trottinettes électriques « sont généralement utilisées pour des trajets de 0,5 à 4 km, soit l’équivalent de 5 à 45 minutes de marche ». Cette dernière pratique ne semble généralement privilégiée que pour des déplacements inférieurs au kilomètre. Revers de la médaille, ces engins sont moins facilement exploitables dans les rues fortement inclinées, sur les pavés, et lors de fortes intempéries. Sauf à avoir prévu la situation à l’avance par soi-même ou à être capable de rebondir facilement en cas de besoin, elles ne permettent pas d’effectuer les courses de la semaine ou d’embarquer d’encombrantes charges avec soi.

Pas rentables…

Boston Consulting Group affirme que la génération actuelle des trottinettes électriques utilisée dans les services partagés ne permet pas d’atteindre la rentabilité. Pourquoi ? Tout simplement parce que le matériel exploité par les opérateurs, conçu au départ pour un usage privé, ne tient en moyenne pas plus de 3 mois, alors qu’il en faudrait 4 au minimum pour couvrir le prix d’achat, sans compter les frais de fonctionnement inhérents au service (récupération des engins, recharge des batteries, entretien général, répartition de la flotte ensuite sur le territoire, communication et marketing, etc.). Selon les calculs du cabinet d’études, un opérateur reçoit 0,65 dollar (0,58 euro) par trajet et une trottinette électrique est utilisée en moyenne 5 fois par jour, soit un total de 3,25 dollars (2,88 euros). Pour amortir un prix d’achat de l’ordre de 375 dollars (332 euros), il faut 115 jours, soit 3,8 mois. Usage intensif, manipulation brutale, vandalisme, etc. nuisent à la durée de vie de ces engins.

…et pas écolos

Dans l’état actuel du fonctionnement des opérateurs, adopter la pratique de la trottinette électrique en free-floating ne serait donc pas vertueux pour l’environnement, en raison d’un véritable gaspillage de matériel et de batteries lithium-ion qui s’accumuleraient et se transformeraient encore trop souvent en déchets au bout d’une durée de vie qui correspond à un très faible pourcentage de ce qu’elle devrait être. Et pas encore de filière bien assise pour leur recyclage. Pire qu’avec les appareils nomades de communication, et pire aussi que dans l’écosystème des voitures et utilitaires électriques pour lesquels des accords ont souvent déjà été signés pour le réemploi des matériaux contenus dans les packs. Après une seconde vie comme unités de stockage, ce que ne permettent pas les batteries des trottinettes électriques.

Démentis

Dans un article consacré au sujet par le quotidien 20 Minutes, quelques opérateurs assurent ne pas se reconnaître dans le tableau brossé par Boston Consulting Group. Lime, par exemple, indique qu’une trottinette électrique « qui semble en fin de vie, on peut la réparer en moins de 30 minutes ». Dott confirme en expliquant ne rien jeter et tout réparer dans un atelier à Rungis, pour du matériel capable de durer entre 9 et 12 mois. Concernant les batteries Lithium, Lime travaillerait « avec une société qui recycle les batteries au lithium à hauteur de 77 %, soit 27 points au-dessus des normes européennes ». Le reste de l’engin bénéficierait d’un taux de récupération des éléments à 96,2%, via une société installée en Belgique.

Des solutions ?

Selon Boston Consulting Group, les opérateurs principaux de service free-floating cherchent à obtenir des fabricants de trottinettes électriques des modèles plus robustes et plus adaptés à leur activité. Ainsi, par exemple, avec des moteurs plus puissants et des solutions pour transporter quelques objets. Mais au final, ne peut-on pas donner raison à ceux qui choisissent d’acquérir leurs propres engins de micromobilité, motivés par un coût d’achat qui reste accessible, l’assurance d’utiliser un engin dont ils connaissent la vie, souvent de qualité supérieure, et un scénario qui rend plus durable sa pratique ?

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