← Revenir aux actualités

L’Europe veut des véhicules électriques plus limités et vertueux Rédigé par Philippe Schwoerer le 15 Mar 2018 à 00:00 0 commentaires

L’Europe enchaîne les rapports et les études sur l’impact des véhicules électriques tout au long de leur cycle de vie, plaidant le plus souvent pour une fabrication au maximum décarbonée, notamment au niveau des batteries. Intitulé « Research for TRAN Committee – Battery-powered electric vehicles : market development and lifecycle emissions », le dernier document en date (février 2018) s’inscrit parfaitement dans cette dynamique et confirme surtout ce qui a déjà été publié à ce sujet. Les risques concernant l’approvisionnement en matériaux pour produire les cellules et le recyclage sont également passés en revue. Nos lecteurs, électromobiliens ou non, sensibilisés aux différents problèmes soulevés par le développement de la mobilité électrique, se désoleront de ne pas trouver un paragraphe consistant concernant les émissions de particules fines. Elles ne sont évoquées que dans un tableau qui compare les sources d’énergies différentes entre véhicules branchés et thermiques.

3 millions de VE dans le monde

Le moins que l’on puisse dire, c’est qu’il est parfois bien difficile de comprendre les raccourcis pris par les auteurs d’études au sujet des véhicules électriques. Dans ce rapport, l’on trouve en introduction quelques chiffres intéressants : 3 millions de voitures électriques en circulation dans le monde début 2018, dont 738.000 en Europe. Pour marquer le décollage du marché, il est indiqué qu’à fin 2016, on en dénombrait déjà 2 millions sur la planète. En revanche, l’on s’aperçoit bien vite que derrière les mots « voitures électriques », l’Europe inclut parfois pas mal de genres à la marge, dont les hybrides rechargeables et les véhicules utilitaires légers qui sont compris dans les chiffres ci-dessus. Aux engins des catégories N1 et M1 s’ajoutent, à ce jour, plus de six cent millions de vélos, scooters et motos électriques, ainsi que plusieurs centaines de milliers d’autres véhicules branchés, dont les bus et quadricycles divers.

Risques de rupture d’approvisionnement

On entend souvent dire que l’approvisionnement en terres rares est un problème majeur de la fabrication des batteries. Ce sont le plus souvent des minerais ou matériaux, – qui n’entrent pas dans cette catégorie -, pour lesquels des doutes existent sérieusement dans un contexte attendu de décollage de la mobilité électrique. L’Europe a dressé une liste de ceux employés dans les batteries lithium-ion à cathode NCM (nickel, cobalt et manganèse) présentant un risque réel. Les plus exposés : le lithium et le cobalt, qui entrent respectivement à hauteur de 1 et 3,1% dans les composants. A l’opposé, l’aluminium (34,5%) dispose de la situation la moins préoccupante. Entre les 2 extrémités, des matériaux moyennement sensibles au niveau de l’approvisionnement : le manganèse (2,8%), le fer (9%), le nickel (3,1%), le cuivre (9,2%) et le graphite naturel (8,2%). Les risques sont divers : épuisement des ressources, concentration des gisements sur un petit nombre de pays, décisions politiques des chefs d’Etat, etc. Le document relativise en assurant : « L’amélioration des processus de récupération de ces éléments à la fin de vie du véhicule peut, dans une certaine mesure, atténuer ces risques concernant l’approvisionnement ». Voilà pourquoi le document plaide pour des « processus de recyclage efficaces ».

CO2 à la fabrication…

Le rapport rappelle que c’est la fabrication de la batterie qui plombe l’impact des voitures électriques au niveau des émissions de CO2, par rapport à un modèle thermique. L’Europe scinde l’opération en 2 étapes. C’est sans surprise la réalisation des cellules qui est la plus énergivore, face à l’assemblage des packs. Le document détaille les différentes étapes à suivre en commençant par la fabrication des électrodes qui demande un environnement parfaitement exempt d’impuretés pour un fonctionnement ensuite optimal et sans danger des batteries. La plupart des cellules sont produites en Chine, Corée du Sud et Japon, des pays où la part d’énergie fossile dans le mix énergétique est importante. En rapatriant la fabrication dans des pays où la part des énergies renouvelables et/ou du nucléaire est importante, le bilan carbone de la réalisation des batteries baisserait de façon importante. Les rédacteurs du rapport mettent en avant la Gigafactory que Tesla « prétend être autosuffisante en énergie renouvelable », pouvant apporter un bénéfice conséquent sur l’impact carbone du cycle de vie des VE.

…et sur le cycle de vie

L’institution européenne rappelle une nouvelle fois : « Pour que les véhicules électriques à batterie de traction offrent une alternative satisfaisante aux modèles thermiques au sujet du dérèglement climatique, ils doivent totaliser des émissions de GES plus faibles sur le cycle de vie ». C’est donc aussi à l’utilisation des engins qu’il convient de prendre soin d’atténuer les émissions de CO2 et assimilés. Le rapport met donc en avant que les différentes études réalisées à ce sujet constatent toutes que la compensation des émissions supplémentaires de GES à la fabrication des VE « dépend en grande partie de l’impact carbone des sources d’électricité utilisées pour recharger la batterie ». L’Europe souligne ainsi que « les voitures électriques n’ont pas d’avantages climatiques inconditionnels par rapport aux thermiques : ces avantages n’existent que dans certaines circonstances ».

Des voitures plus limitées

Parmi les recommandations de l’Europe pour une mobilité individuelle décarbonnée, un point qui n’est pas souvent mis en avant et qui devrait faire tousser les constructeurs comme nombre d’automobilistes. Le rapport milite pour l’adoption de véhicules électriques plus petits avec une autonomie raisonnable. « La tendance à augmenter la taille et l’autonomie des véhicules électriques est défavorable tant du point de vue de l’atténuation du changement climatique que de l’utilisation des ressources », lit-on dans le document. Ce point se retrouve également au niveau des véhicules thermiques. La mode des SUV a fait qu’en 2017 l’impact carbone des nouvelles immatriculations des véhicules thermiques s’est élevé par rapport à 2016, et ce, au-delà du phénomène de retrait des modèles diesel face à ceux à essence. Les auteurs ne nient pas les avancées technologiques des batteries lithium-ion, mais ils appellent à ce que les gains en autonomie ne dépassent pas ceux acquis au niveau de l’efficacité énergétique des cellules. Afin de ne pas accentuer l’impact carbone des engins, du fait de batteries embarquées qui pourraient devenir plus lourdes, « seules des améliorations progressives peuvent être attendues dans un futur proche ».

Un bilan qui irait en s’améliorant

Selon l’étude, « le bénéfice climatique des voitures électriques par rapport aux modèles thermiques devrait augmenter dans un proche avenir en raison des évolutions prévisibles dans le secteur de l’électricité en Europe mais aussi avec la fabrication de l’acier ». Les auteurs assurent : « Atteindre l’objectif attendu des solutions de transport plus durables nécessite une bonne compréhension environnementale de nos technologies ». Ils comptent, « pour éviter les pièges environnementaux potentiels de l’adoption des véhicules électriques », à la plus grande transparence quant aux implications environnementales des gammes de produits mis sur le marché par l’industrie automobile et ses fournisseurs, en particulier les producteurs de batteries et les entreprises de recyclage. Ces dernières sont d’ailleurs pointées pour ne diffuser que peu d’informations concernant leur activité. Le rapport plaide pour l’ouverture d’un véritable canal de communication qui relierait au gouvernement de leurs pays, mais aussi aux chercheurs, tous ces industriels acteurs de la mobilité électrique.

partager cette actualité sur :

Commentaires

Rejoindre le réseau AVEM

Vidéos

Toutes les vidéos
Newsletter