Pour le grand public, le pilotage de la recharge des véhicules électriques pour équilibrer le réseau national, diminuer les besoins d’ouverture de nouvelles centrales et profiter d’une énergie à moindre coût est une chimère. Rien de vraiment compliqué pourtant dans un écosystème qui se présente désormais comme incontournable et profitera au plus grand nombre.
L’Avere-France diffuse un document de 75 pages qui fait le tour de la question et dresse une liste de préconisations à destination des pouvoirs publics. La version de 2019 vient d’être rafraîchie en particulier avec le concours de structures en rapport avec les énergies, comme la CRE, EDF, Enedis, Engie et RTE.
Pour faire simple, le pilotage vise à gommer les pics de consommation que pourrait intensifier dangereusement la recharge des batteries avec un parc de plus en plus important de véhicules électriques. Il s’agit de différer autant que possible cette opération. Plusieurs moyens sont possibles : brancher volontairement les engins aux heures creuses, utiliser un dispositif pour un départ à l’heure paramétrée (pilotage statique), recourir à un système qui va gérer automatiquement le lancement de la recharge en fonction de signaux reçus (pilotage dynamique), etc.
Mieux encore, en s’appuyant sur la recharge bidirectionnelle, il est possible de puiser, dans les batteries des véhicules électriques à l’arrêt, un peu d’énergie pour faire face aux pics de consommation. Elles seront régénérées ensuite, lorsque la demande générale sera plus faible. C’est le principe des réseaux intelligents et du V2X (Vehicle-to-Everything).
Ce dernier se décline en V2G (Vehicle-to-Grid = du véhicule au réseau) lorsqu’il s’agit de soutenir un réseau électrique collectif, V2H (Vehicle-to-Home) à l’échelle d’une maison, V2B (Vehicle-to-Building) avec un bâtiment tertiaire ou d’habitation. Les deux derniers prennent plus de sens encore lorsqu’ils sont couplés avec une part d’autoconsommation rendue possible par exemple en faisant installer des panneaux photovoltaïques en toiture du logement ou sur le parkings de l’entreprise.
De façon simpliste, les détracteurs de l’électromobilité calculent de manière brute les besoins en nouvelles centrales électriques en multipliant le nombre de VE par la capacité énergétique moyenne des batteries qu’elles embarquent. Comme si tous les automobilistes branchés avaient besoin en même temps de recharger entièrement les packs. Est-ce que tous les utilisateurs de modèles diesel ou essence font le plein des réservoirs tous les soirs et au même moment dans les stations-service ? Non ! Alors pourquoi ce serait différent avec des voitures électriques ?
Quoi qu’il en soit, les projections des grands acteurs de l’énergie ne prêtent pas davantage à sourire. RTE prévoit par exemple près de 36 millions de VE en circulation dans l’Hexagone à horizon 2050. Le parc comprendrait déjà 5,3 millions de VE en 2028 et 8,5 millions en 2030. Et ce, afin de lutter contre le volume encore grandissant des émissions de carbone dues au secteur des transports.
Le développement rapide d’une nouvelle technologie porte rarement en elle une partie de la solution pour éviter un déséquilibre potentiel. C’est pourtant le cas avec les véhicules électriques qui amènent la possibilité de former des centrales électriques tampons lorsque le réseau électrique est le plus fortement sollicité.
Parce que c’est plus simple, actuellement 65 % des électromobilistes et 90 % des utilisateurs de VE en entreprise n’ont recours à aucun pilotage de la recharge. Ce qui se traduit par un grand nombre de personnes qui branchent leur câble sur une même courte période en soirée. Dans ces conditions, avec un million de véhicules électriques, il faudrait s’attendre à une puissance d’appel en pointe de l’ordre de 700 MW.
Dans son livre blanc, l’Avere-France rapporte une estimation de RTE selon laquelle « 70 à 85 % du volume énergétique des recharges est susceptible d’être piloté, c’est-à-dire placé au meilleur moment pour le système électrique et sans impact pour l’utilisateur ».
L’idéal étant de pouvoir faire jouer aux VE le rôle de facilitateur pour l’intégration des énergies renouvelables intermittentes qui se développent en parallèle. Ce qui permettrait d’exploiter au maximum leurs productions. Si de plus en plus de voix s’élèvent en France pour pousser le pilotage de la recharge, c’est parce que le véhicule électrique se présente comme le plus efficace des consommateurs.
En 2030, le potentiel de déplacement de l’appel de puissance du soir serait déjà deux fois plus important que celui offert par les ballons d’eau chaude dans notre pays. En outre, contrairement à ces derniers, les VE n’ont en grande majorité pas besoin d’être rechargés tous les jours. Ce qui permet d’imaginer un pilotage national à la semaine.
Autre chose qu’un ballon d’eau chaude ne saura pas faire : réinjecter sur le réseau électrique une part de son énergie pour lisser les appels de puissance. Lorsqu’elles sont compatibles avec la recharge bidirectionnelle, les voitures électriques peuvent s’y prêter. Selon RTE, en 2050, entre 45 % et 68 % des électromobilistes devront recourir aux modes de pilotage unidirectionnelle de la recharge et de 2% à 20% exploiteront les possibilités du V2X.
C’est pourquoi l’Avere-France « préconise la mise en place immédiate d’une feuille de route pour inciter au pilotage de la recharge dans le cadre de la loi de programmation sur l’énergie et le climat ». Il s’agit en particulier de lancer en France une filière du V2G. Mais aussi de donner envie aux électromobilistes d’y participer. Ainsi au moyen d’une communication encourageant le pilotage tarifaire sous toutes ses formes. Et avec des mesures fiscales ciblant l’installation de points de charge pilotés et en exemptant de taxation l’énergie soutirée des batteries puis réinjectée sur le réseau.
Le livre blanc au sujet du V2X et du pilotage de la recharge est l’occasion pour l’Avere-France de formuler 9 recommandations. Il est question de la mise en place de subventions et d’appels à projets pour le développement de bornes bidirectionnelles qui seraient pilotées par un opérateur de services, mais aussi d’une incitation additionnelle au bonus gouvernemental pour l’achat d’un véhicule électrique compatible avec le V2X.
Un travail doit être effectué pour affiner les conditions de fonctionnement du V2G, en particulier par la définition précise des plages temporelles et l’inclusion de cette solution au TURPE.
Avec l’idée de garantir une interopérabilité de bout en bout, un langage commun doit être trouvé pour mettre en place un écosystème complet du V2X à l’échelle de la France, et aussi de l’Europe. Ils réuniraient par exemple les énergéticiens, les constructeurs d’automobiles, les opérateurs de recharge, etc. Ce qui implique le partage de données à standardiser, depuis les véhicules électriques jusqu’aux fournisseurs d’électricité.
Parmi les recommandations de nature administrative, on trouve encore dans le document une levée des freins à l’utilisation des batteries en soutien aux énergies renouvelables, ainsi qu’un allègement des procédures de déclarations liées au V2G et d’homologation/certification des véhicules et des bornes compatibles.
Télécharger le livre blanc du V2X et du pilotage de la recharge
INFOS
Avere-France
5, rue du Helder
75009 Paris
C’est toujours très beau sur le papier mais en réalité, ça ne se passe jamais comme on voudrait. Avec l’habitude prise avec les VT, les nouveaux électromobilistes avec des batteries a fortes capacités ne brancheront pas leurs VE tous les soirs (si ils ont de quoi les brancher), mais souvent seulement si c’est nécessaire. Donc il est probable que le lissage des pics de consommation ne soit qu’une vue de l’esprit…
[…] rappel pour les lecteurs qui ne sont pas encore familiarisés avec les technologies du V2X, ou Vehicle-to-Everything. A traduire de façon développée et interprétée : « Du véhicule […]
[…] pilotage de la recharge du « quotidien » constitue un enjeu essentiel pour optimiser l’insertion de la mobilité […]
[…] L’Avere-France vient de publier son baromètre mensuel concernant les infrastructures de recharge pour véhicules électriques. Un baromètre reposant sur des données transmises par Gireve, la plateforme d’interopérabilité de la mobilité électrique. Ses différents indicateurs permettent un suivi régulier de l’évolution du déploiement en France des points de recharge ouverts au public. Ils donnent aussi des indications sur leur utilisation, notamment en termes de volume de session. En février 2024, l’offre de points de recharge a continué de progresser sur l’ensemble du territoire. En forte progression en 2023, les bornes de recharge rapide continuent de gagner du terrain. Elles font aussi quelques progrès en matière de disponibilité, un défaut pointé du doigt lors des derniers mois de 2024. […]
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